Transition dans l'histoire d'excellence de l'ingénierie franco-roumaine

Les interviews du Gala CCIFER 2023

Témoignage Paul-Henri KOHLER, directeur général Rossmann Roumanie, Romcarton & Ambro

Les équipes ERD de Rossmann Roumanie ont répondu avec enthousiasme à ce challenge extraordinaire, de reproduire le symbole parisien en carton ondulé, qui sera le phare du photo corner du Gala CCIFER 2023.

Les équipes ERD de Rossmann Roumanie ont répondu avec enthousiasme à ce challenge extraordinaire, de reproduire le symbole parisien en carton ondulé, qui sera le phare du photo corner du Gala CCIFER 2023 – édition dédiée aux avancées techniques franco-roumaines. 

Le carton ondulé, précurseur du modèle d’économie circulaire, ayant le plus faible impact environnemental dans le secteur de l’emballage, est le seul matériau d’emballage 100% renouvelable, 100% recyclable et 100% biodégradable. 

De sa production à sa réutilisation, en passant par son recyclage, le carton ondulé conserve un cycle de vie bien supérieur à d’autres matières qui sont également utilisées pour les emballages. Ainsi, le carton ondulé peut être renouvelé et recyclé à un taux allant de 92 à 95%. La fabrication du carton ondulé permet de réduire jusqu’à 60% les émissions de CO2 par rapport aux autres matériaux couramment utilisés. 

La versatilité du carton ondulé ne cesse de nous étonner et nous remercions la CCIFER pour cette occasion de montrer encore une fois que le carton ondulé est plus qu’un emballage. 

Interview avec Bertrand Lemoine, architecte, ingénieur et historien français

Peut-être que les monuments du futur ne seront pas forcément spectaculaires mais seront représentatifs d’autres valeurs. La valeur de l’intégration de la nature par exemple, ou encore la valeur patrimoniale, qui est une ressource non renouvelable.

D'abord, combien de fois avez-vous visite la tour Eiffel ?

150 fois environ. Mais je dois dire qu’à chaque fois c’est une nouvelle expérience, une redécouverte, c’est quelque chose de différent.

Peut-on conclure que la tour Eiffel représente la plus grande attraction de la France ? 

C’est à la fois une attraction, depuis sa construction en 1889 pour l’ Exposition Universelle de Paris, une attraction qui était la tour la plus haute du monde, en plus une tour sur laquelle on pouvait monter et découvrir ce Paris qui s’était profondément transformé à l’époque.

Aujourd’hui encore elle demeure une attraction forte. La preuve c’est le nombre de touristes qui la visitent chaque année, presque 7 millions. Elle reste quelque chose qu’on vient voir. Le public est toujours surpris, même si ce n’est plus la tour la plus haute du monde car il y a maintenant des tours beaucoup plus hautes. Mais elle reste unique, spécifique. Au-delà de son attraction, c’est aussi plus que ça, c’est un monument. Un monument c’est quelque chose qui a un rapport avec la mémoire, qui symbolise, qui porte des valeurs. C’est aussi une sorte d’emblème, de représentation dans le monde de Paris, de la France, d’un certain progrès technique, scientifique et en ce sens elle continue à inclure cette signification beaucoup plus large qu’une simple attraction comme pourrait être, par exemple, la grande roue de Londres. La tour Eiffel porte un message assez complexe, assez ambivalent, avec un côté ludique, qui plait aux foules, c’est normal, et un côté beaucoup plus puissant, qui incarne des choses qui sont au-delà de l’attraction ou de la distraction.

Des millions de visites ont lieu annuellement, des nationalités de partout dans le monde. Qui visite le plus la tour ?

Il y a beaucoup d’étrangers, européens d’abord, des Américains, beaucoup de touristes de tous les pays, des Japonais, moins de Chinois, mais quand même un panel représentatif de toutes les nationalités qui visitent Paris. Il faut rappeler que Paris est la première destination touristique au monde (45 millions de visites annuelles). Et dans le circuit parfois court des touristes à Paris, visiter la tour Eiffel est un des principaux choix. Il y a également Notre Dame, avant l’incendie, qui est beaucoup plus visité que la tour Eiffel (12 millions de visiteurs), même le parc Disney est davantage visité, mais la tour Eiffel est une étape pour toutes les nationalités qui visitent Paris.

Comment se fait l'entretien de la Tour en ce qui concerne la peinture (tous les 7 ans) - quel est le procédée pour la peindre ? De combien de litre de peinture a-t-on besoin ?

La tour Eiffel est construite en fer. C’est un matériau résistant, durable, mais sujet à la corrosion par la rouille qui est due à l’exposition à l’air et aux intempéries. II faut donc protéger sa structure, ce que l’on fait depuis l’origine. Aujourd’hui on a 19 couches de peinture qui se sont superposées sur la tour. Pourquoi on rajoute ces couches ? Parce que la peinture s’use à cause du vent, de la pluie et petit à petit, la peinture s’en va. En moyenne, on a refait la peinture tous les 7 ans pour la protéger contre la corrosion. Mais les premières couches de peinture contenaient du plomb, qui est nocif pour la santé. Il faut donc utiliser des techniques pour emballer les éléments de la tour de façon à recueillir les anciennes peintures décapées ou encore les dissoudre dans des solvants pour éviter que les particules ne s’échappent dans l’air et ne le contamine. C’est donc un processus assez complexe. On est donc très attentif à recueillir la peinture ancienne qu’on enlève. On ajoute à chaque nouvelle couche à peu près 40 tonnes de peinture, ce qui est peu par rapport à la structure de la tour qui pèse environ 7500 de tonnes.

La prochaine campagne de peinture, qui a d’ailleurs commencé, devrait aussi aboutir à une légère modification de la couleur. La tour a eu dans le passé plusieurs couleurs (rouge, plutôt jaune, marron assez clair). On va revenir à un marron un peu plus lumineux, un peu plus jaune pour lui donner de l’éclat. C’est le principal souci de la maintenance de la tour. Par ailleurs certaines pièces ont été changées et il faut entretenir les ascenseurs pour continuer à transporter le public en toute sécurité.

Environ 18 000 pièces liées par des millions de rivets ont été utilisées. Dans l’automobile, par exemple, on peut avoir une image de tous les éléments qui composent un véhicule.  Est-ce qu'il existe un découpage minutieux de toutes ces pièces de la tour qui puissent être mises à plat dans une exposition ?

Dans l’industrie automobile il y a une grande diversité de pièces, un ensemble extrêmement complexe. Dans la tour Eiffel c’est beaucoup plus simple. Vous avez 4 ou 5 catégories de pièces ; vous avez des plaques de tôle de différentes dimensions, des cornières en forme de L, des éléments en forme de U, de I et de T. Et vous avez 2,500,000 rivets qui assemblent tous ces éléments à travers les trous qu’on a percé dans les pièces. Je compare souvent cette simplicité du vocabulaire des éléments de la tour avec celle des êtres vivants sur terre : tous (les plantes, les animaux...) sont constitués à partir d’un ADN de 4 bases qui s’assemblent et génèrent toutes les formes différentes d’êtres vivants. Avec ces éléments de base et les rivets, on a fait toutes les structures métalliques du XIXe siècle. Donc la tour c’est un vocabulaire très simple mais avec une syntaxe complexe. Des assemblages de milliers de pièces ont été calculés pour qu’ensuite on puisse les assembler avec des moyens assez rudimentaires. À l’époque, on n’avait pas de l’ordinateur, mais avec des tables de logarithmes on pouvait calculer les structures et obtenir des plans qui permettaient de tracer les pièces et de les percer. La moitié des rivets ont été fixés à l’usine de Levallois-Perret, près de Paris, et l’autre moitié sur le site, avec de petites équipes de quatre ouvriers qui posaient les rivets. Donc un moyen d’assemblage extrêmement simple, répétitif mai qui a permis de réaliser en un temps record cette structure extraordinaire.

La popularité de la tour Eiffel a donné naissance à plusieurs répliques autour du monde. Est-ce que ces démarches ont eu besoin du conseil de la part des experts de France ?

Non, je ne pense pas. Des répliques il y en a beaucoup, des miniatures, des petites qui mesurent 3 mètres de haut, 5 mètres de haut, on a même construit une tout récemment à Paris, devant la tour Eiffel, qui faisait 15 mètres de hauteur, qui va circuler dans certains évènements. On a construit de beaucoup plus grosses répliques, une à Las Vegas, une autre à Shenzen en Chine et il y a beaucoup de tours qui ressemblent à la tour Eiffel. Donc il y a une forme générique mais il n’y a pas de modèle déposé de la tour. D’ailleurs, sa forme même est due à des considérations tout à fait scientifiques et techniques. Il a fallu prendre en compte la prise au vent – le vent pousse horizontalement, le poids de la tour pèse verticalement, la composition des deux forces, horizontale et verticale, donne une force oblique. Cette force oblique détermine tout simplement la courbure de la tour, pour qu’elle résiste au mieux au vent latéral qui pourrait la déstabiliser. On a tracé des courbes de résistance et la tour suit ces courbes, au moins à partir du premier étage car la base des piliers est rectiligne pour simplifier la construction. La tour exprime intuitivement cette forme issue du calcul.

L'empreinte de Gustave Eiffel est aussi en Roumanie sur des constructions symbole comme le Pont de Ungheni - Iași ou l'hôtel Traian de Iasi. La collaboration franco-roumaine en termes d'ingénierie est également connue sur la construction de la tour Eiffel avec la contribution de l'ingénieur roumain Gheorghe Pănculescu (1844 -1922). Avez-vous des références sur cette collaboration du point de vue technique ? 

Malheureusement, je ne peux pas vous confirmer le rôle exact de Pănculescu. Bien sûr, Eiffel avait des collaborateurs, dont les principaux étaient Maurice Koechlin et Emile Nouguier. Ce sont eux qui ont conçu l’idée de la tour, l’un était charge du bureau des études et l’autre en charge du montage et tout ce qui était construction. Et ensuite il y avait une cinquantaine d’ingénieurs qui travaillaient pour l’entreprise. Même si je ne peux pas la confirmer, il est possible que cet ingénieur roumain soit un des collaborateurs Eiffel à cette époque. Par ailleurs, Eiffel a fait plusieurs ponts en Roumanie. Dans mon livre, Gustave Eiffel, Une vie monumentale, j’ai documenté celui de Ungheni, construit en 1872 ainsi que les autres ponts sur la ligne de Iasi à Ungheni mais je n’ai pas trouvé de mentions sur l’hôtel de Iasi. Il a réalisé en 1880 tous les ponts de la ligne de chemin de fer de Ploiesti à Predeal, soit 13 ponts, dont le plus grand a 96 mètres de portée. Il a fait aussi en 1880 un pont routier, le pont de Campina. Ensuite, Eiffel a fait équipe en 1883 avec l’ingénieur Anghel Saligny pour la construction du grand pont de Cernavodă.

La Roumanie est un des pays de l'UE prédisposé à de l'activité séismique. Si cette tour avait existé dans notre pays, est-ce qu'elle aurait résistée lors d'un tremblement de terre sévère ?

Je pense que la tour Eiffel aurait très bien résistée à un tremblement de terre. Elle est bâtie sur 4 points d’appui, et même si les fondations avaient bougé, la tour Eiffel est assez souple pour résister au choc d’un tremblement de terre. De plus le sommet de la tour Eiffel est libre, il n’est pas accroché à quelque chose. On n’est pas dans une structure rigide. De manière générale, on peut dire que les structures métalliques sont beaucoup plus résistantes aux séismes parce qu’elles sont souples et peuvent absorber l’énergie d’un tremblement de terre.

Il y a une université à Paris qui porte le nom de Gustave Eiffel. Comment voient les futures générations le métier de Gustave Eiffel ? Qu'apporte aujourd'hui la science, les nouvelles technologies ? Quel est le bâtiment/l'édifice/la construction du futur ? Qu'apporte de nouveau du point de vue technique, structurel, créativité, ingéniosité, etc ?

L’université Gustave Eiffel forme des ingénieurs, des scientifiques bien sûr, comme d’autres universités. Aujourd’hui on est encore dans un schéma où la course à la plus grande hauteur reste une espèce de défi.  La tour Burj Khalifa à Dubaï fait 828 mètres de hauteur. On est toujours dans l’idée que plus on est haut, plus on est dans un exploit constructif, ce qui est vrai, mais ce n’est pas forcément utile de construire toujours plus haut. Toutes les villes finissent par se rassembler à cause de ça. Peut-être que les monuments du futur ne seront pas forcément spectaculaires mais seront représentatifs d’autres valeurs. La valeur de l’intégration de la nature par exemple, ou encore la valeur patrimoniale, qui est une ressource non renouvelable. En Europe, en particulier, nous avons une situation assez unique d’avoir un patrimoine de villes et de villages tout à fait remarquable. On est désormais plus attentif à le protéger. Le futur, ce sera aussi des monuments dont a compris la valeur culturelle et même la valeur d’usage et la qualité de vie qu’ils  génèrent. Ces monuments méritent d’être préservés, même si on les modernisera. À Paris, par exemple, beaucoup d’immeubles ont été construits il y a 150 ans, à l’époque d’Haussmann. Il n’y avait pas d’électricité, pas de salles de bain, pas d’ascenseurs, les immeubles faisaient 5 ou 6 étages. Aujourd’hui tous ces immeubles ont été transformés et on continue à y vivre de manière contemporaine, confortable, mais avec en plus la qualité d’espace et d’architecture qu’ils génèrent. On sera peut-être moins dans l’exploit d’une manière générale, très haut, très grand, et peut être plus dans la logique d’un patrimoine du quotidien. En Europe, en Amérique du Nord, en Chine, en Russie, les populations vont décroître. Le but sera moins de construire à nouveau du neuf mais de transformer, d’adapter l’ancien aux besoins actuels tout en travaillant avec ce qui existe. Cela génère aussi une culture commune, partagée, je parle des villes européennes, qui sont toutes différentes, de Saint-Pétersbourg à Lisbonne, ou de Glasgow ou Bucarest, mais qui ont quelque chose de commun.

 

Interview réalisée par Monica Ioniță, Responsable Communication et Relations Publiques

Bertrand Lemoine se rendra en Roumanie, à Bucarest, les 29 et 30 septembre. Il est invité spécial du Gala CCIFER 2023, Bienvenue dans le Futur !

 

 

Biographie

Bertrand Lemoine est ingénieur diplômé de l'Ecole Polytechnique et de l'Ecole Nationale des Ponts et Chaussées et architecte DPLG. Il a été président de l'Académie d'Architecture jusqu'en mars 2021. Il est directeur de recherche honoraire au C.N.R.S. Il a été jusqu'en octobre 2013 Directeur général de l'Atelier international du Grand Paris et jusqu'en 2010 Directeur de l'Ecole nationale supérieure d'architecture de Paris-La Villette. C'est un spécialiste de l'histoire et de l'actualité de l'architecture, de la construction, en particulier métallique, du patrimoine et de la ville (en particulier Paris et le Grand Paris) aux XIXe et XXe siècles, ainsi que des questions énergétiques et numériques. Il est l'auteur de 43 ouvrages et d'une trentaine d'expositions. Il a dirigé la revue ACIER, revue d'architecture.

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